’’Nom : Ellie. Prénom : Léopold. Date de naissance : 25 Novembre 1896. Adresse : aussi variable que le temps. N° du téléphone : Ce n'est pour nous. Poids : ça varie selon les événements. Taille : environ 1 m. 76. Pointure des gants : tout doit aller. Des chaussures : 28-30 (prendre 29). Des faux-cols : inconnus au G.B.D. Des chemises : toutes me vont. En cas d'accident prévenir Mme R. Ellie, 19 rue Duluc, Bordeaux."
Telle est la peinture narquoise que fait de lui-même, en première page d'un Agenda-Bijou, en 1917, un jeune homme jeté à moins de vingt ans dans la première Guerre Mondiale. Ses souvenirs tiennent en trois carnets noirs patinés par leur séjour dans différents uniformes. Lire la suite en cliquant ici
La demande que je faisais de rechercher des correspondances anciennes analogues aux lettres du jeune Rivière ("Un Mazamétain à Saint-Domingue", Sud-Tarn Tribune n° 46-47, octobre 1981), n'est pas restée vaine : mon ami Bertrand de Viviés a retrouvé de passionnants documents familiaux qui prouvent, une fois de plus, les relations étroites, au XVIIIe siècle, de notre région castraise et de la lointaine colonie. Encore cette correspondance montre-t-elle un autre échantillonnage social : le jeune Rivière partait "aux isles" pour être raffineur de sucre et tenter la fortune ; les arrière-grands-oncles de Bertrand s'y rendaient comme militaires.
Il faut remonter un peu dans le passé. Pendant la guerre de Succession de Pologne, en 1754, un jeune officier au régiment de Chartres-Infanterie,
Jacques-Grégoire Martin de Viviés, dit Castelpers pour le distinguer de ses cinq frères, écrit du fond de l'Italie à sa mère et à ses tantes, demeurées au château familial de
Viviers-les-Montagnes. Lire la suite en cliquant
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Le 4 août 1835, le Dr Casimir Lades, frère du maire, se présente à la délibération municipale et entre dans le vif d’un sujet qui occupe alors tous les esprits :
-Vous savez que le choléra-morbus nous menace de toute part, que d’un moment à l’autre il peut se manifester dans cette commune. Je viens vous engager en
conséquence à faire mettre sans retard à exécution les moyens sanitaires que l’autorité supérieure vous a indiqués. Moi-même, ces jours derniers j’ai été témoin oculaire des ravages que cette
épidémie exerce à Castelnaudary. Là, je me suis convaincu que c’est ordinairement les gens de la classe pauvres, les gens de peine, qui en sont atteints. Je me ferai donc un devoir ici,
messieurs, d’intéresser votre sollicitude sur le sort de ceux de ces malheureux que ce fléau pourrait attaquer, en cas d’invasion dans notre commune, en vous proposant de voter dans votre sagesse
une certaine somme pour subvenir à leur besoin. » Lire la suite en cliquant ici
Jean Escande a préfacé ce journal du siège de Strasbourg, en 1870, écrit par une jeune fille de la bonne société, Cécile de Dartein. Ce document dormait dans les archives de la famille de sa femme. Cécile raconte au jour le jour les assauts de « ces chers Prussiens », qui ne ménagent pas leurs efforts pour détruire Strasbourg, et en terroriser sa population. Elle ne manque ni de courage, ni d’humour, pour nous conter l’installation des familles dans les caves...,
Cette curieuse lettre pleine de renseignements politiques serait du vendredi 18 Janvier 1771, veille de la dissolution du Parlement. "M. l'abbé Terray remplit les fonctions de la Marine": quand ? (voir Malet Isaac XVIIIe p. 473-5).
Quant à la lettre plaisante "dattée du 13 de Paris", on peut penser qu'elle est bien plutôt écrite de Toulouse... car il s'agit d'un pamphlet sur la Du Barry et sa belle-sœur : on devine que les Toulousains qui connaissaient parfaitement les du Barry pour les avoir eu sous les yeux, pauvres hères, jusqu'à l’ascension extraordinaire et ignominieuse de Guillaume, le mari postiche de Jeanne Bécu, favorite royale mariée, titrée et rentée pour les besoins de son concubinage.. Lire la suite en cliquant sur ce lien
Pourquoi M. de Canecaude est-il parti à Paris ? Il paraîtrait que c'est après la mort de sa femme. Pierre Petit, son valet resté à Toulouse, aide l'intendant ou l'homme d'affaires, à dresser l'inventaire. La famille de Canongettes de Canecaude, languedocienne, portait "d'argent à 3 pales de gueules au chef d'azur chargé d'une croisette d'argent". Dans les tiroirs d'une armoire dormaient les papiers relatifs à la terre de Canecaude, mais ce n'est pas là qu'on fait porter les meubles, mais à Larra, entre Cadours et Grenade. Le patron se fait envoyer des effets à Paris, mais on vend des tapisseries à Mlle de Lafont, qui a l'air à l'affût de tout ce qui passe à portée de sa main.
"On court risque de n'être pas compris aujourd'hui lorsqu'on parle de la Gendarmerie" écrit le comte Beugnot à propos du mari de la Comtesse de La Motte, celle de
la célèbre Affaire du Collier de la Reine, lequel était Gendarme. En effet, avant la Révolution, la Gendarmerie est un corps de cavalerie d'élite, qui descend des Gens d'Armes de Charles VII
cavaliers armés de pied en cap dont la vocation était plutôt celle de nos modernes chars d'assaut... Nos gendarmes actuels ne descendent nullement de cette Gendarmerie Royale d'avant 1789, mais
de la Maréchaussée. Lire la suite en cliquant sur ce lien
Quand on se promène actuellement dans la minuscule et si tranquille rue Quinquempoix, en face Beaubourg, et qu'on voit les gravures de 1720 qui la représentent comme une voie énorme, bourrée de monde, avec de hautes façades... on a peine à croire que c'est la même et on peut facilement imaginer que nos aïeux avaient l'imagination fertile.
Pas cependant pour ce qui est du Nouveau Riche, personnage éternel : des cracs boursiers on en voit un en 1929 ; le plus drôlement raconté c'est par Groucho Marx dans ses Mémoires aussi peu conventionnelles que possible.
Des Mississippiens nous en avons eu l'équivalent à notre époque .. Lire la suite en cliquant ici
Pendant que dans sa solitude du consulat de France à Civita-Vecchia, Stendhal parodie le style des calicots en commençant ses lettres par "J'ai bien reçu vos soies grèges et vos cotons anglais » des commerçants d'Ispagnac, au bord des Gorges du Tarn, reçoivent, eux, des lettres de maisons marseillaises qui débutent sérieusement par : "Nous sommes favorisés de votre amicale du 19 courant"... ou "nous avons l'avantage de vous confirmer notre précédente du 14 dernier"...
La famille Jaffard descendait, selon la tradition, d'un Djafar venu à Marseille sous François 1er, avec la flotte du célèbre Keïr Eddine Barberousse.
A 29 ans, en 1801, Timoléon de Viviès, gentilhomme languedocien de Castres (Tarn), émigré depuis dix ans dans l'Armée de Condé et venu échouer avec elle en Galicie et en Volhynie (Pologne russe), profite des lois d'amnistie pour rentrer en France.
Mais avant de pouvoir rejoindre sa famille, il est obligé d'accomplir une quarantaine de prés d'un an à Nancy. Il demeure dans la famille Stadler, émigrée comme lui, et de retour dans une certaine gêne pécuniaire. Revenu enfin chez lui, dans son château de Viviers- les-Montagnes qui n'a pas été nationalisé grâce à la présence de ses frères, Timoléon écrit des lettres reconnaissantes à la mère de son ami, Madame Stadler, qui le considère d'ailleurs comme son propre fils. Madame Stadler est une femme âgée. Son mari est infirme et impotent. Leurs enfants ont tous émigré avec eux : Madame de Corail et Madame de Saint-Florent, qui a épousé un Provençal. Saint-Florent a pris du service dans l'armée russe et demeure désormais à Saint-Pétersbourg. Lire la suite en cliquant ici
Le claveau (du latin clavis, clé), est cette pierre en forme de coin servant à fermer le dessus d’une porte ; clé architecturale de la porte, sans laquelle celle-ci ne tiendrait pas debout, il est aussi la clé symbolique de la porte, idéale pour personnaliser la maison.
Le linteau (du latin limes, limite), quant à lui, est une pierre rectangulaire qui, en remplaçant le claveau dans certaines maisons, ferme la partie supérieure d’une ouverture, et soutient la maçonnerie de cette ouverture. « Limes » (limite) dit assez avec « clavis » (clé), combien sont liées, outre leurs fonctions architecturales, leurs fonctions symboliques de délimitation.
Ainsi, ont fleuri ça et là, durant des siècles, de façon individuelle, des claveaux et des linteaux sculptés ou gravés à la main, uniques, et c’est bien sûr à
cette architecture populaire que nous nous sommes intéressés.
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Adrienne Puech, née Tournier, qui avait marié sa fille Eva en 1894 au docteur Abélous, profite en 1908 d’une tournée de prospection de son mari Armand, ingénieur, pour visiter l’Egypte (cet Armand Puech a une rue à Mazamet ; il aurait inventé les filtres pour purifier l’eau des usines dans la gorge de Mazamet).
CHANSONS CONTRE LE PARLEMENT DE TOULOUSE 1771.
Une lettre et deux chansons... Voilà tout ce que j'ai retrouvé de la destinée d'un haut et puissant personnage du XVIIIe siècle, M. de Bardy, conseiller au
parlement de Toulouse. On sait que les Parlements provinciaux, depuis la Fronde, se prenaient facilement pour des "Catons", des "Brutus" face à l'absolutisme royal... ce qui ne les empêchait
nullement d'empocher de très substantiels pots-de-vin de plaideurs riches et avisés, car ces Parlements devaient, en partie, rendre la Justice.Leur
réputation de républicanisme venait seulement du fait qu'ils s'opposaient systématiquement à toute innovation royale, même bénéfique (surtout bénéfique).. Lire la suite en cliquant sur ce lien
Entre les soussignés M. le Comte de Villèle propriétaire du château et terre de Morville Basse canton de Caramam Haute-Garonne d'une part,
et Jean Cassagne, jardinier, arboriste et pépiniériste demeurant chés M. Jacques François Campmas propriétaire d'un jardin à la Grande Allée à Toulouse, chés lequel il est placé en ce moment, fesant tant pour lui que pour sa femme Anne Pourquier d'autre part,
A été convenu ce qui suit :
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Eugène Rouvellou (né le 6 Octobre 1895 à Cherbourg) habitera en fait pratiquement toute sa vie Bellac, où il est fabriquant de chaussures. Il fait partie de la classe 1915 mais évitera la guerre : de Décembre 1913 à Août 1916 il occupe "des postes importants dans la plupart des services, notamment à la mise en fabrication, aux expéditions et au contentieux" de la fabrique de chaussures Sylvestre Vincent et fils, à Limoges. On ignore la raison de son exemption, car il parait jouir d'une excellente santé.
Dès 1913, à 18 ans, il milite dans les rangs de l'Action Française (Groupe Royaliste de Limoges).. Lire la suite en cliquant ici
"Etienne Duffillo est l'arrière-grand-père de ma mère", nous dit JLC, antiquaire à Castres. Né le 26 Décembre 1862 à Condom (Gers), Etienne Duffillo a été appelé le 7 Décembre 1883 au 3e Régiment d'infanterie de Marine. Fondé en 1838, ce régiment, qui s'est illustré à la célèbre ferme des "Dernières Cartouches" à Bazeilles en 1870, était depuis 1880 stationné à Rochefort. Il fut très employé dans toutes les expéditions coloniales de la fin du XIXe siècle. D'après la loi de 1872, Etienne Duffillo aurait du faire cinq ans de service : en fait, envoyé en Nouvelle-Calédonie, il ne fit que 3 ans et 5 mois, jusqu'au 10 Mai 1887. Il a laissé un manuscrit, fort bien tenu mais inachevé, où il raconte son voyage de Rochefort à Sydney, à bord du transport de troupes "Le Havre". C'est son récit que vous pourrez lire en cliquant ici
On trouve sous le Premier Empire un major Jumel, qui passe directement général de brigade sans subir les grades intermédiaires, ce qui montre de la chance ou un certain mérite. Il fut nommé « pour servir à Java » .....Pour ce qui est du collage des patronymes paternels et maternels afin de créer ce qu’on appelle la noblesse d’apparence, Jumel de Noireterre est loin d’innover....
De tout temps notre région a eu des relations privilégiées avec les colonies, soit par la vente de produits locaux comme la draperie sous l'Ancien Régime ou les coiffures militaires (fez, chéchias) sous la 3° République. Il faut ajouter les régiments qui stationnent à Castres au XIXe s. et qui comme le 12e chasseurs à cheval, le 5e hussards, envoient régulièrement des contingents en Algérie. A la fin du siècle, le 2e Génie de Montpellier y enverra ses sapeurs, et on peut dire que depuis 1830 jusqu'en 1962, il n'y a pratiquement pas eu de famille castraise, labruguiéroise ou mazamétaine qui n'ait un ou plusieurs de ses membres dans quelques-uns de ces pays lointains, d'Afrique ou d'Orient.
La correspondance de la famille Alayrac puis Augier, entre 1889 et 1905 contient un certain nombre de ces lettres si intéressantes pour la mentalité d'alors. Lire la suite en cliquant ici
Vandalisme et Profanation.
En 1792, dans l'église du couvent des Cordeliers, à Lavaur, se tint l'assemblée électorale pour nommer les députés à la Convention. "Les opérations étaient terminées, et les choses s'étaient assez bien passées, lorsqu'un prêtre jureur, le curé de... se leva en pieds, s'indignant de ce que dans un milieu où se tenait une assemblée d'hommes libres, on laissait subsister un monument qui rappelait la bassesse des adulations dont les peuples, vrais esclaves, entouraient leurs tyrans, etc, etc... " Le curé se lève, s'arme d'un lourd marteau qu'il avait apporté à dessein, et "se faisant hisser sur le haut du mausolée du maréchal d'Ambres, il abattit d'un coup vigoureusement appliqué la tête de la statue".
Or il s'agissait d'un magnifique monument œuvre de Marc Arcis, célèbre sculpteur vauréen qui avait travaillé pour les jardins de Versailles et l'église de la Sorbonne, la cathédrale de Montauban...
Carnet de route d’un officier du 9è régiment d’artillerie de Castres 1915. Par Jean Escande et Bertrand de Viviers
Régiments de Castres à la Belle Epoque, les 3e et 9e d’Artillerie ont entre 1875 et 1914 vu passer des milliers d’hommes. Il est pourtant rarissime d’en trouver trace dans des correspondances privées. La Bonne Fortune, favorable aux chercheurs, a indiqué à Bertrand de Viviés au fond d’un placard le Carnet de Route tenu par son grand-père Timoléon en janvier février 1915.
L’histoire comme on la raconte sur les boîtes de bonbons.
Dans son livre, "La Vie Quotidienne en France en 1830", Robert Burnand, parlant des tables d'hôtes du Quartier Latin, où le diner coûtait 32 sous (1 F. 60 centimes) note : "il est vrai qu'en ajoutant 40 centimes, on pouvait se faire servir le dimanche soir "une perdrix aux choux, une salade de homard, une sole au gratin et une meringue à la crème". Le tout pour deux francs ! Même en multipliant par dix, où trouverions-nous un tel menu pour un tel prix?"
Robert Burnand n'a oublié qu'une chose : nous dire ce que représentent deux francs dans la première moitié du XIXe siècle, période particulièrement stable sur le plan monétaire. Tout simplement deux journées d'ouvrier.
Quand Louis Séganville s'engage au 1er Bataillon du Tarn, en Floréal an 1, c'est-à-dire en Avril 1793, il a seize ans et demi. Il reste neuf mois dans ce bataillon de volontaires, où l'on ne sait ce qu'il fait, ni le bataillon non plus : il y a alors tant de pagaille en France ; c'est le plein temps de la Terreur, et on a guillotiné Louis XVI en Janvier. Probablement pressé de trouver une arme plus efficace, on retrouve le jeune homme cavalier au 22e régiment de Chasseurs à Cheval le 24 Février 1794, à 17 ans. Ce régiment de formation récente n'est autre lui aussi qu'un ex-corps de volontaires : les Chasseurs de la Légion des Pyrénées.
Or, quelques jours après l'engagement de Séganville, le 8 mars, un certain Béssières, 26 ans, passe capitaine. Il fera son chemin puisqu'il mourra, sur le champ de bataille, maréchal de France. Personne évidemment en 1794 ne peut le prévoir, mais avec une intuition extraordinaire dans cette époque bouillonnante, le jeune Séganville s'attache à lui. Lire la suite en cliquant ici
Quoi de plus intéressant que la vie ordinaire de cette petite ville à la période la plus troublée de notre histoire? Toutes les Histoires de clocher sont reprises dans les registres municipaux de l'époque.
Jean Escande nous en sort la quiescence .
Paru dans la revue de Villeneuve de Berg en 1985
A qui veut se donner la mine du languedocien de souche, on ne saurait trop recommander de ne pas aborder les gens avec un "bonjour", qui sent à dix mètres son étranger et resserre la méfiance de l'indigène déjà pas tellement causant. Il est une façon franche, rustique et bien disante, de s'aborder entre autochtones du pays de Lavaur à la montagne Noire : -"As déjunat?"
Un duel d'agents secrets à Villeneuve de Berg au XVIII ème siècle : Choderos de Laclos contre le comte d'Antraignes.
De nos jours, l'importance politique qu'avait Villeneuve surprend. A l'époque, c'est un point névralgique: une forteresse catholique et royale au centre d'un pays peu sur depuis les guerres de religion...
Paru dans la revue de Villeneuve de Berg en 1882
Comment je suis entré dans la Résistance.
J’aimais la Résistance ; je n’admettais pas Vichy, je n’aurais pas pu ne pas être résistant ; c’était impossible, impossible.
J’avais des idées très bien arrêtées en 40. J’étais antifasciste comme on respire, antifasciste.
J’étais anti-communiste parce qu’antifasciste ; quand je suis arrivé en Allemagne que j’ai su ce que l’on faisait à l’Est, là j’ai
été encore plus anti-communiste. Pour eux, le communisme était le symbole de la Liberté, parce qu’ils ne savaient pas ce qui se
passait de l’autre côté. Moi je le savais... Parce que je m’intéressais à la naissance du nazisme et je savais que, parallèlement, il y avait un autre nazisme de l’autre côté, à l’Est, et que les deux étaient cousins-germains. Il fallait être un con absolu pour ne pas le
voir. Lire la suite en cliquant
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AU DÉBUT DE LA RÉVOLUTION
Dans la liquéfaction sociale qu'est la Révolution à ses débuts, le premier problème, à Castres comme ailleurs, est celui du maintien de l'ordre. Or l'armée est en pleine décomposition: «La défection de l'armée n'est pas une des causes de la Révolution : elle est la Révolution même» (Rivarol).
Pourtant, dès la déclaration de la patrie en danger, 4 mars 1792 : «Dans le district de Castres, c'est une fureur pour contracter des engagements dans les troupes de ligne ; dans deux jours il en a été contracté plus de 50 et nous apprenons que dans les autres districts c'est le même empressement ; on a été même dans le cas de refuser un bon nombre de jeunes citoyens qui n'avaient pas encore l'âge requis ; ces recrutements nous enlèveront plusieurs volontaires».
Jean Dacier est le père de l’érudit connu André Dacier (1651-1722), Garde des livres du Cabinet du Roi Louis XIV, membre de l’Académie des Inscriptions, Secrétaire perpétuel de l’Académie Française, qui a écrit des volumes de traductions d’auteurs latins : Horace (dix volumes), Plutarque (huit volumes). Epoux de la célèbre Anne Lefèvre, dite Madame Dacier (1654-1720), elle aussi traductrice de l’ « Iliade et de l’Odyssée ». Ces deux protestants abjurèrent.
Remarié à Suzanne de Falguerolles, Jean Dacier en eût à Castres le 6 avril 1651, André Dacier. Lire la suite en cliquant sur ce lien
Une chanson en languedocien, imprimée à Castres et aimablement communiquée par Monsieur Emilien Durand, ancien maire d’Escoussens, donne le ton des querelles électorales de 1906. L’auteur n’est désigné que par les initiales L. du M. et prend parti pour le baron Reille. La vignette centrale, dessinée par Pagés, représente « la Bouléguéto » sorte de danse-hésitation entre Henri Bés et Frédéric Milhau, à qui l’auteur taille un joli costume...
Milhau est grand et maigre, Bés petit et bossu. Au-dessous, un cornemuseux en casquette souffle dans sa crabette montagnarde.
Le registre du notaire Trilhe pour Escoussens en 1684 est tenu du 5 janvier au 9 juillet, du moins c’est tout ce que j’en ai retrouvé. Soit 31 actes en six mois, ou cinq par mois, ce qui n’est pas mal pour un village qui compte alors de sept à huit cents habitants. On sait que depuis Charles VII, Escoussens est propriété des Chartreux de Castres. Ceux-ci n’y viennent pas souvent : cette année 1684, le syndic des Chartreux, c’est-à-dire le frère chargé des affaires temporelles de l’abbaye, est Octavien de Creil. Il peut se réclamer d’une parenté nombreuse et connue dans le Valois et le Beauvaisis ; mais comment est-il venu chez nous?
paru dans : BULLETIN DES SCIENCES, ARTS ET BELLES-LETTRES DU TARN 1974
Il neige sur l'Auvergne, en cet hiver 1783-84. Le marquis François-Gilbert Henry de Salvert-Montroignon, que j'aime à me représenter encore jeune -et beau- erre avec morosité en son château de Clémensat, où le bloquent la neige, l'impécuniosité et la malchance persistante. Il fait froid, dans un vieux château, l'hiver...
Le marquis, officier aux Dragons du Roi « en vacance », car il n'a pas les moyens de soutenir sa charge, est veuf et remarié. Il a des ennuis d'argent ; il écrit à son premier beau-père, qu'il appelle « mon cher papa » :
Monsieur,
Monsieur Boulon de Boileau,
conseiller au Baillage, et Siège Présidial,
Encienne rue de Paris a Senlis,
A Senlis.
Nos lettres ce serons sandoutte croizez cher papa, mais la votre ma vivement alarmé, votre santé ainsi que celle de ma chère tante de Terigny est fort mauvaise, et votre atshme vous fait beaucoup soufrir, pourqu’oi donc ne pas vous servir de votre Elixir, qui vous fesoit tant de Bien, il faut le continuer et ne pas trop changer de Remède, Lire la suite en cliquant ici
La Révolution à La Française... Voilà qui fait rêver, dans le droit fil de 1789. Quoi de plus beau, quoi de plus fringant qu'une révolution à la française ? Et quand, en plus, le patelin où elle se carre, s'épanouit, porte justement le nom de La Française, tous nos vœux sont comblés : nous allons assister à une de ces reconstitutions où depuis deux cent ans excellent les manuels d'Histoire Officielle, Victor Hugo et les films soviétiques : mâts de cocagne, jolis drapeaux tricolores, paysans en carmagnoles brunes et sabots vernis à bords recourbés qui dansent autour de l'Arbre de la Liberté... Hélas ! Si les paysans dansent, c'est devant le buffet, comme nous l'apprend le document inestimable que je viens d'acquérir en vue du Deuxième Centenaire de notre immortelle révolution. Lire l'article en cliquant ici
Le nom de famille de Fortuné est celui d'une ferme importante à l'angle des routes de St Félix Lauragais et de celle de Castelnaudary. [Jalabert Fortuné Gabriel est né le 13 décembre 1887, dans la maison de son grand-père maternel, porte de Vaure à Revel, fils de Louis, Léon Jalabert, menuisier, âgé de 26 ans, et de Eugénie Marie Bastié, ménagère, 22 ans, mariés, demeurant ensemble à Revel dans la maison de la dite].
Pour Maria, [elle doit être née en 1890 : elle a 20 ans en 191] ; les enveloppes nous apprennent qu'elle est tailleuse chez Madame Barbaste, à la Grande Allée, à Revel. Il y a certainement entre ces deux personnes de vingt ans une différence sociale au détriment de la jeune fille qui ne nous est pas perceptible, mais dont on verra les suites à la fin de ce petit roman par lettres. Lire la suite ici
Les trois frères Choussat, nés à la fin du XVIIIe siècle à Escoussens, eurent des destinées bien différentes. Joseph, l'aîné, a vingt-huit ans en 1797 quand son
père, le vieux Choussat Cadet, négociant, lui lègue à quatre-vingt-trois ans une succession fort obérée. Joseph, personnage nonchalant, restera vieux garçon et ne dut pas faire fructifier les
affaires paternelles, car sous Louis-Philippe en le trouve employé chez M. Négret, commerçant à Castres.
Jean-Étienne, le second, plus vif et remuant, est aussi de loin le plus intéressant. Ayant commencé tout jeune à remplacer l'instituteur du village, qui, de l'avis
des Escoussendols, ne sait ni lire ni écrire, il quitte bientôt ce métier de misère. A vingt-et-un ans, en 1793, il est pris par la levée en masse, qui envoie aux frontières tous les jeunes gens
valides (sauf ceux qui désertent dans les bois). Comme nous sommes en guerre avec l'Espagne, notre héros est expédié à l'armée des Pyrénées-Orientales. Qu'y fait-il? Le plus clair qu'on en
apprend c'est qu'il est fait prisonnier et ne revient qu'en 1795. Gageons que dans cette captivité il a dû se faire des relations, car des années après, nous le retrouverons, lui et sa famille,
retirés après de mauvaises affaires à Majorque comme secrétaire du consulat de France. Lire
la suite en cliquant ici
11 Janvier 1690 : Daniel Mialhe, sieur de Lavergne, bachelier en Droit, Juge en chef du Comté de La Case au siège de Viane,
ordonne que Anne de Franc, femme de noble Jean de Puech sieur de Longuevergne, mère et légitime administreresse de demoiselle Ester Dadoune de Puech, leur fille, en conformité de l'édit du Roi de
décembre dernier qui accorde le bien de ses sujets sortis du royaume à leurs plus proches parents, ... restera avec ladite Ester de Puech sa fille dans la maison de la Sautié et aura la
jouissance à compter du 1er Janvier tant de la maison et domaine que de tous les autres biens ayant appartenu audit sieur de Longue Lavergne et à ses enfants sortis du royaume.
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Un sport très en vogue chez les jeunes femmes bien faites et sans fortune à la fin du XVIII ème : se faire coucher sur des testaments de gens bien rentés, surtout quand la succession n'a pas d'héritiers !
Emilie Porto-Carrero, fille illégitime d'un Grand d'Espagne, et une championne à ce jeu.
Paru dans la revue du Vivarais 1982 Tome 86
Pendant que Charles X s'installe béatement dans un pouvoir qu'il estime durable, un jeune homme de 30 ans, Félix de Dartein (1) prend place à Lavaur, cette année 1826, comme sous-préfet. Il y restera 3 ans. Félix de Dartein n'est pas nouveau dans l'administration : il a déjà été secrétaire du Préfet du Doubs, Villiers du Terrage. Son supérieur, le vicomte Decazes, Préfet du Tarn, envoie à Félix différentes notes à méditer dans son bureau près de Saint-Alain : la mode sous la Restauration est au reboisement et à l'entretien des forêts ruinées par 25 ans de guerre et de révolutions. Il y a fort à faire...
Les derniers régiments de cavalerie légère
en garnison à Castres : le 6° et le 7° Hussards (1869-1874).
Succédant au 12° régiment de Chasseurs à Cheval, à Castres depuis 1865 le 6° Hussards arrive dans les derniers mois de 1869. L’Indépendant du Tarn, journal républicain publié dans la ville même, signale dès le 16 septembre le passage à Albi des « Colonnes du 6° Hussards » : pour le 13 octobre on attend les deux escadrons de dépôt, commandés par un chef d’escadron (16 Officiers, 191 hommes, 215 chevaux). Puis, les 19 et 20 octobre deux escadrons, commandés par le lieutenant-colonel (8 Officiers, 232 hommes, 256 chevaux). Enfin le 21, deux escadrons et l’état-major, commandés par le colonel (13 Officiers, 235 hommes, 278 chevaux). Soit un peu plus de 700 hommes en tout. A cette date de septembre 1869, le peloton hors-rang est déjà arrivé à Castres.
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En mars 1682, Maître Jacques Basset, Recteur de Maziès, teste en faveur de nombreux neveux et nièces. Maziès se trouve entre Cambon-les-Lavaur et Le Fajet, mais il ne faudrait pas croire que tout ce qui précède ait été trouvé facilement : la découverte de Maziès n’a pas été si rapide... De 1682 où teste Maître Basset à cette belle journée ensoleillée de l’hiver 1980 où je me suis rendu à Cambon-les-Lavaur, 300 ans ont passé, effaçant bien des choses... L’église et le presbytère de Maziès, par exemple, dont il est question dans le testament. Le Recteur ne reconnaîtrait plus son gîte.Cambon-les-Lavaur est un village sur la route de Puylaurens à Toulouse. Apparemment personne n’y a jamais entendu parler de Maziès... Sauf finalement une veille dame, qui se souvient : Lire la suite en cliquant sur ce lien
J’eus l’idée de faire raconter sa guerre à un des anciens qui vivaient encore à Escoussens dans les années 1970 : M. Jean-Baptiste Quintane, né en 1895 à Igon, dans les Basses-Pyrénées, était petit, chauve, alerte malgré ses soixante-dix ans passés. C’était un grand pêcheur de truites et, à leur défaut, de goujons, voire de rougères, ramasseur de champignons aux beaux jours d’automne : le ruisseau du Vernazobre, le Roc d’En Val et le cours du Sant à Verdalle, près de l’église Saint-Jean, n’avaient plus de secrets pour lui. C’était un ancien cordonnier bordelais. Lire la suite en cliquant ici
En 1709 un brave homme de lieutenant-colonel de dragons de Louis XIV, se trouvant mal en point dans une chambre de la rue de Seine, à Paris, et comme le laboureur de La Fontaine "sentant sa mort prochaine" fait venir à son chevet une paire de dignes tabellions pour leur dicter par le menu des dernières volontés extrêmement circonstanciées et militairement minutieuses.
Après différents legs à des dragons de son régiment qui lui ont servi de domestiques, notre officier, qui a le sens de la famille décide de laisser une somme considérable - non pas à son frère cadet - car il a deux frères, tous deux comme lui officiers de cavalerie, mais à l'aîné de son frère cadet : nous sommes en France de la Royauté et du droit d'aînesse. Lire la suite en cliquant ici
Pezons, avocat à Albi, député du tiers-état de la sénéchaussée de Castres aux Etats-Généraux. Il devint par la suite juge au tribunal criminel du département du Tarn, et fut nommé, en mars 1799, au Conseil des Anciens. En 1800 il est devenu juge au tribunal civil d'Albi, et il en exerçait encore les fonctions en 1806 (1).
« A Monsieur
Monsieur Pezons député
de la sénéchaussée de Castres à l'assemblée
nationale rue Coquilliére N° 8
A PARIS.
Castres 12 avril 1790.
Je regardais il y a quelques années chez M. Gérard Heuillet, l’ancien maire de Soual, un ouvrage qu’il avait fait relier : « La Ganse Blanche ». Ce n’est que le recueil des pièces du procès, énorme, qui expédia à Gaillac 132 personnes, en général de très jeunes gens, prévenus d’avoir massacré, dans leur beau domaine d’En-Laure, un des frères Grach et sa femme. Ces Grach ne sont pas des royalistes à tout crin comme l’illettré Jeanou Combes, mais des protestants républicains.
- Néanmoins, ils ont un point commun, me dit M. Heuillet : c’étaient, eux aussi, des accapareurs... Ils sont tombés pour une histoire de marché noir.
Ceux que l’Histoire Officielle a depuis, flétris sous les noms ridicules de « muscadins », « Collets Noirs », « Jeunesse dorée », « antirévolutionnaires » et autres « ganses blanches » ; ce ne sont rien d’autre que des gens du petit peuple qui crèvent de faim.
ALIMENTS FRELATES.
Nos arrière-grands-parents avaient d’autant plus de mérite à faire de la bonne cuisine que les produits qu'on leur proposait étaient falsifiés. C'est devenu une
espèce de lieu commun de considérer la fin du XIXe siècle comme un âge d'or culinaire : les restrictions des guerres de 14-18 et 39-45 sont pour beaucoup dans cette vision idyllique. Elle est
pourtant fausse : jamais les fraudes alimentaires ne furent plus florissantes que dans les années 1870-1900. Elles n'avaient d'ailleurs pas attendu cette période pour s'épanouir, et dès
l'antiquité on trouve des voyageurs empoisonnés dans quelque "trattoria" par de la morue blanchie à l'alun ou des poissons cuits dans du cuivre mal nettoyé. Lire l'étude en cliquant ici
Tout ce qu'on sait du Commandant Barreau, c'est qu'il est de Nantes. Encore le sait-on par une note
manuscrite au crayon de son fils, sur le plan merveilleux que cet officier de pontonniers a dressé des ponts jetés de l'île Lobau sur le Danube, pendant la bataille de Vienne en 1809. Joint au
plan, un carnet d'une centaine de pages manuscrites est intitulé "Itinéraire des routes que j'ai faites depuis mon départ pour me faire examiner à Rennes en Août ou Septembre 1802. Les gîtes sont
désignés par une astérisque quand j'ai pu me les rappeler". Voilà un bon portrait du Commandant. C'est un touriste, qui considère la Grande Armée comme une agence de voyages. Il ne parle pas de
ses campagnes encore moins de victoires, de faits d'armes, d'uniformes ou de drapeaux, mais de marches et de pays visités. On apprend ainsi que ce jeune homme, qui a peut-être vingt ans en 1802,
s'est présenté à l'Ecole Polytechnique. Lire son voyage en cliquant
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Camille, vigneron dans l'Aude, vient d'avoir 31 ans quand la guerre de 1939 se déclare. Il vit avec ses vieux parents - son père
a déjà fait la guerre de 1914 dans la réserve - dans un val isolé, au milieu d'un creux de montagnes des Corbières. Le village le plus proche est à un kilomètre et demi, et il n'y a guère de
ressources : c'est un hameau. Il faut aller, pour trouver épicerie, docteur, pharmacien, jusqu'à Lagrasse ; et en ces années-là, on le sait, le machinisme dans ces campagnes n'a guère encore
pénétré, et tout se fait à l'aide d'un cheval. D'ailleurs quand on connaît la région, on voit combien il est difficile de la cultiver au tracteur. lire la suite en cliquant ici
Avertissement
Il y a du Capitaine Fracasse dans Fontsaguette, il y a du Monte-Cristo. Tout en somme, ce qu’aimait Jean dans la littérature populaire, tout ce qu’il y admirait
: les descriptions à l’envi, poétiques, détaillées et précises, les brillantes métaphores, les vieux logis ruinés, les vies de garnisons, les batailles, les trésors cachés, les sympathiques
bandits au grand cœur, qui se révèlent souvent plus propres que les honnêtes, les vengeances, les prédictions et les moments de clair de lune quasi surnaturels.
Car Fontsaguette se veut roman populaire ; et de fait c’en est un sur bien des points : les rebondissements, les personnages qui s’y croisent, s’y recroisent,
s’y reconnaissent, s’y aiment, et s’y font du mal, le suspens, le souffle enfin, puissant, qui propulse les héros avec brio, tels les pions d’un vaste jeu d’échecs, comme dans les meilleures
pages d’un Théophile Gautier ou d’un Alexandre Dumas Père.
Cependant Fontsaguette est écrit par un pur érudit, que dis-je, LE grand érudit devant l’Eternel, qui lui, n’avait rien de populaire. Les références
littéraires, les citations latines et les chansons anciennes y sont nombreuses, jusqu’à un argot du XVIIIe connu d’une poignée d’élus sans doute, et la véracité historique, rigoureuse dans ses
fourmillants détails et ses adroites circonvolutions, y est omniprésente. Jean s’est régalé à étaler son vivier de connaissances, et à brandir ses opinions à chaque page, comme autant de bouquets
tout faits. Opinions politiques, opinions antimilitaristes, mais aussi ses dadas personnels : l’inconstance des hommes, la trop grande patience des femmes, leur faiblesse vis-à-vis du sexe
fort.
C’est une formidable leçon d’histoire sur la Révolution ; à cela nul doute. Et aucun livre d’histoire ne révèlera au néophyte les incontestables horreurs de
cette période, qui s’apparente à s’y méprendre aux camps de la Mort de la dernière guerre.
Les descriptions, les détails sont plus que soignés ; ainsi Fontsaguette, cette ferme du bout du monde dans la Montagne Noire – qui entre autres choses n’a pas
eu beaucoup de troubadours pour la chanter, si ce n’est Jean -, est décrite à ravir ; on en sent les odeurs, on entend les cris des chiens, le concert des oiseaux dans les frondaisons ; on
s’attable à la cuisine, on y vit ; Paris au XVIIIe est vivant comme l’est celui d’aujourd’hui, avec ses ruelles, ses églises, ses cochers, ses marchands, ses révoltes, ses horreurs, ses
amusements et ses absurdités.
Néanmoins, ces détails que Jean s’est amusé à narrer, se développent longuement, quelquefois au détriment des grandes lignes du récit, survolées, si
l’inspiration ne lui en est pas venue. Ainsi, Amsterdam reste inexistant : Jean préfère décrire à la place les clochers de Paris qui, dans le rêve du graveur Bance, sont nettement plus attractifs
pour l’écrivain.
Et puis, il y a des anachronismes, des impasses, des longueurs. Il y a des personnages secondaires que l’on ne retrouve jamais. Jean ne peut s’empêcher de mettre son opinion sur les architectes (qui furent ses condisciples pendant huit ans aux Beaux-Arts) qui « logent volontiers leurs contemporains dans des clapiers dont eux-mêmes se gardent de faire usage ». Sans doute le propos est-il vrai, mais il a sa place ici comme un cheveu sur la soupe. Des passages, simples moments d’existence pris sur le vif, ne débouchent sur rien. Ainsi le marchand de fromages est-il amusant, certes, vivant, cela va sans dire, mais sans plus de but ; les trois bandits, à la fin, s’éclipsent honteusement, sans un mot, alors qu’ils auraient eu à dire, vu l’importance qu’ils avaient revêtu tout le long du récit.
C’est un roman vivant, inachevé et imparfait. Mais quoi ! La vie n’est-elle pas vivante - par définition -, inachevée et imparfaite ? N’est-elle pas
pétrie de situations mirobolantes qui se révèlent être des impasses ? N’est-elle pas ornée de personnages flamboyants qui nous hantent un moment et disparaissent un beau jour sans autre forme de
tambour ?
Dire le nombre de réminiscences et de souvenirs personnels que Jean a mis dans Fontsaguette, est incalculable. Chaque chose, chaque lieu, chaque personne qui a
compté un tant soit peu dans son existence, se retrouvent dans le roman. Il est inutile d’en faire l’énumération : au néophyte, elle ne dira rien. Il suffit de retenir que Louis Bance, le
graveur, c’est lui ; il en a l’orgueil, la vision désabusée du monde. Et il finit par épouser, après bien des aventures, Stefanie, la belle Polonaise, fille d’aristocrate guillotinée, dans
laquelle on reconnaît l’amie de toujours, Stanie de Golish. Et puis tous les amoureux des « Enfants du Paradis » reconnaîtront évidemment le « Chand d’habits » et le « Vous avez souri, ne dites
pas non, vous avez souri ».
Fontsaguette n’est pas fini. Les deux premières parties, abouties, dans lesquelles on sent une maîtrise parfaite des intrigues, une trame réfléchie menée
tambour battant, eussent demandé une suite rigoureuse. Mais cette suite s’étiole dans les deux dernières parties inachevées ; des notes avaient bien été prises, ça et là, sur des papiers de
rencontre, jamais numérotés, cela va sans dire, mais Jean négligea – ou se désintéressa, vu le peu de succès que le roman décrocha auprès des éditeurs - de les taper à la machine et son écriture,
rapide, jetée avec fougue sur le papier par un esprit plus rapide encore, se révéla bien souvent illisible. Et puis, il y avait des doubles, des triples de Fontsaguette. Et chacun de ces doubles
avait été retravaillé, en dépit des autres, chacun à des endroits différents. Un casse-tête que nous avons tant bien que mal reconstitué. Cependant il reste des manques, certes grossièrement
ébauchés, auxquels nous avons pallié par de brèves phrases de liaison.
Jean note dans son journal, au tout début de 1970 : « Ces temps derniers à La Coste j'ai entrepris le roman auquel je pense depuis longtemps : l'histoire d'un
volontaire de 92 ». Dès lors, Il y travaille d’arrache-pied, avec la passion qui lui était propre. Ce n’est pas rare qu’il écrive toute la journée : « toute la journée sous le porche les
aventures d’Olympe » (Journal, 21 janvier 1970), sachant qu’il ne fait pas que ça : « J'alterne le tapage des lettres des Lacroix [lettres de grognards de Castres], heureusement très lisibles, et
mon roman : je poursuis mes héros de la bataille de Tirlemont aux frasques des émigrés à Schonbornslust. La nuit dernière je me suis levé à 4 h. du matin pour continuer leurs aventures, c'était
délicieux, le jour se levait et plein d'oiseaux s'ébrouaient le long du ruisseau, dans la brume. Le soir, je relis les mémoires de d'Espinchal, Saint-Priest, François de Cézac et autres émigrés
pour me maintenir à température convenable. Il me semble que j'ai plus d'un point commun avec ces gens : le renfermement, l'inadaptation au milieu et à l'époque » (Journal, mars
1970).
Il se renseigne, il se documente : « Continué à étudier sur la carte Michelin n° 53 (Nord) la campagne de 93 : environs de Cambrai, Maubeuge et Valenciennes -
que j'ai vues en 1956 encore bien abîmés par la 2e G.M. Bricard donne de bons renseignements, Vernère et Putigny aussi, mais pour la vivacité du récit c'est encore à Thiébault qu'il faut en
revenir ». (Journal, 5 octobre 1970). Le 30 janvier 1970 : « Ce mois-ci écrit 55 pages pour "Fontsaguette" car je crois que c'est le nom que je choisirai pour ce roman ». Beaucoup de chapitres
qu’il note dans son journal n’existent plus, ou n’ont pas été retenus dans la version finale.
En écrivant Fontsaguette, Jean se met à en sculpter les héros : « Pour me délasser, ayant écrit tous les jours, le soir je sculpte un petit fantassin en bicorne
dans un morceau de planche de l'ancienne bibliothèque (...) Je sculpte un petit hussard révolutionnaire dans un éclat de pin ». (Journal, 19 et 24 mars 1970). Il fit aussi huit dessins pour
illustrer Fontsaguette.
Ce roman ne trouva jamais d’écho auprès des éditeurs, et fut refusé avec une jolie régularité ; « L’inadaptation au milieu et à l’époque » dont parle Jean de
lui-même avec justesse, n’y est sans doute pas étrangère. Et puis le récit est historiquement trop précis, sans la légèreté inconsistante qui paraît-il « plaît » aux lecteurs de notre temps. Jean
s’est trompé d’époque : nul doute que né au XIXe, il eut pu prendre place sans balancer, dans les journaux à feuilletons, auprès d’un Balzac, d’un Dumas, d’un Gautier, d’un Eugène Sue, auprès des
plus grands enfin.
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